Friday 15 June 2012

Le siège de La Rochelle, le piège de la Rochelle

15/06/2012

Du soutien appuyé à Royal au tweet vengeur de Trierweiler, l’impromptu de La Rochelle laissera des traces sur l’image de François Hollande

Que pèse une seule circonscription dans une majorité de gauche qui s’annonce confortable ? Que pèsent des grondements de jalousie féminine, même aux sonorités présidentielles, au regard des orages économiques et européens redoutés ?

La Rochelle, pourtant, semble être devenue la capitale politique de la France. Dimanche soir, c’est le sort de Ségolène Royal qui sera guetté en premier. Le tweet de Valérie Trierweiler finira peut-être par être oublié. Mais ses conséquences politiques et symboliques risquent d’être durables, bien au-delà de ce second tour des élections législatives.

D’abord en raison de l’engagement inédit des plus hautes autorités institutionnelles de la gauche. Ségolène Royal est la seule candidate socialiste à avoir bénéficié d’un mot personnel de François Hollande sur sa profession de foi - d’autres candidats de la majorité présidentielle auraient apprécié un tel coup de pouce. Jean-Marc Ayrault et Martine Aubry sont venus la soutenir en fustigeant avec la dernière énergie la candidature d’Olivier Falorni. Le chef de l’Etat, le chef du gouvernement et de la majorité, la chef du parti. Difficile d’être plus officiellement soutenue. Du coup, si l’issue du scrutin est conforme aux prévisions des sondages, la défaite de Ségolène Royal sera aussi celle de Hollande, Ayrault et Aubry. Même si leur victoire est par ailleurs incontestable.

C’est aussi l’équilibre délicat entre les personnalités socialistes, pensé par le président de la République, qui serait déstabilisé. « Exemplaire durant la primaire », comme elle a pris la précaution de le rappeler dans « Libération », Ségolène Royal, vaincue par les électeurs, mais surtout humiliée par celle que lui a préférée son ancien compagnon, ne deviendrait-elle pas une grenade dégoupillée dans la majorité ? La femme blessée, à n’en pas douter, saurait se faire blessante.

Mais même si la présidente de la région Poitou-Charentes digérait sa défaite, et même si elle était élue, les dégâts de l’affaire du tweet resteraient durables. Pour avoir poursuivi Nicolas Sarkozy tout un quinquennat durant pour le « Fouquet’s » et le yacht de Bolloré, François Hollande et les socialistes savent ce qu’a d’indélébile l’empreinte des premiers pas personnels d’un mandat présidentiel. Déjà « Les Guignols de l’info » croquent cruellement un président écrasé sous l’autorité de sa compagne. Même injuste ou insultante, une caricature marque l’opinion. Mais dans ces francofolies politico-conjugales, le chef de l’Etat a déjà été contraint d’écorner deux de ses règles : ne pas s’immiscer dans la campagne législative, ne pas mêler - même si c’est à son corps défendant -vie publique et vie privée. En invitant Valérie Trierweiler à se montrer « discrète », le Premier ministre a fait publiquement l’acte d’autorité que François Hollande ne peut faire qu’en privé. Mais le siège de La Rochelle a décidément un prix bien élevé.
guillaume Tabard
http://blogs.lesechos.fr/guillaume-tabard/le-siege-de-la-rochelle-le-piege-de-la-rochelle-a10997.html

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